En 2022, alors que le musée installé dans la dernière demeure et le dernier atelier du peintre Eugène Delacroix fête les 90 ans de son ouverture au public, sa collection s’enrichit de deux nouveaux dons. Il s’agit d’un beau dessin à la plume de Delacroix, Etude de deux paons, d’un cygne et d’un cheval, offert par la Société des amis du musée et d’un tableau d’Hyppolite Poterlet, une esquisse pour Dispute de Trissotin et de Vadius, donné par son nouveau président, Edwart Vignot.

Eugène Delacroix - Etude de deux paons, d’un cygne et d’un cheval

Delacroix aime observer la nature et ceux qui l’habitent. Mais au-delà de la curiosité, du plaisir et du délassement que lui procure sa contemplation, la nature est pour le peintre un objet d’étude et d’intérêt. C’est à travers le dessin qu’il saisit dans un premier temps la beauté et la complexité de la nature et de ses détails.
Sur cette feuille datée du 27 mai 1854, Eugène Delacroix a représenté les animaux qui ont pu l’intéresser lors d’un séjour à Augerveille, chez son cousin l’avocat et homme politique Pierre-Antoine Berryer (1791-1868).

Au centre de l’œuvre, on reconnait deux majestueux paons dont l’artiste a su saisir les attitudes en quelques traits de plumes. On aperçoit également en bas de la feuille un cygne déployant ses ailes, et peut-être un second cygne derrière lui. Si le paon est un animal rarement représenté dans l’œuvre de Delacroix, le cygne accompagne quelques scènes de l’artiste, notamment comme sur la fresque Léda et le cygne aujourd’hui conservée au musée Delacroix.

Enfin, la partie supérieure du dessin accueille un cheval caractérisé avant tout par le traitement très allusif de la tête de l’animal. Si les oiseaux sont peu nombreux dans l’œuvre de Delacroix, les représentations de chevaux viennent à l’inverse peupler une multitude d’œuvres du peintre romantique.

Delacroix raconte dans son Journal, le samedi 20 mai : « Berryer, qui est la bonté et la facilité mêmes, nous a promenés partout. Il a un vivier dans son parc et de l’eau partout ; étables magnifiques avec un taureau superbe. » puis, le samedi 27 mai : « Avant déjeuner, dessiné les jeunes chevaux, et croquis d’après les figures fantastiques dans les roches. »

Ce dessin est particulièrement intéressant pour la collection du musée Delacroix car il vient compléter une série de 81 dessins de l’artiste, dont une partie est consacrée aux animaux.

Hyppolite Poterlet - Dispute de Trissotin et de Vadius

Hippolyte Poterlet (1803 – 1835) a à peine seize ans quand il rencontre dans les galeries du Louvre Eugène Delacroix, alors âgé d’une vingtaine d’années. Les jeunes gens se lient d’amitié. Dessinateur, peintre et graveur, Poterlet appartient au premier cercle des amitiés artistiques du jeune Delacroix.

Le critique Théophile Silvestre dit à propos de Poterlet : « Mais un artiste que Delacroix chérissait entre tous c’était Hippolyte Poterlet, doué ou plutôt affligé de la sensibilité la plus nerveuse et de la délicatesse la plus raffinée du coloriste. Sitôt que Delacroix avait esquissé un tableau important, Sardanapale ou Le Christ au Jardin des Oliviers, il courait avec un croquis de son œuvre et une toile blanche chez son ami, qui, en deux heures, lui avait donné son avis en lui faisant une esquisse à sa manière. »

L’ Esquisse pour Dispute de Trissotin et de Vadius, donnée au musée national Eugène- Delacroix par Edwart Vignot, président de la Société des amis du musée Delacroix, est une esquisse pour le tableau Dispute de Trissotin et de Vadius que Poterlet a exposé au Salon de 1831 et qui est aujourd’hui conservé dans les galeries du musée du Louvre.

Il illustre une scène des Femmes savantes de Molière : une dispute entre Trissotin et Vadius au sujet de leurs poèmes respectifs. Poterlet semble avoir été particulièrement inspiré par Molière, goût peu partagé par Eugène Delacroix.

Le don de ce tableau permet au musée Delacroix d’acquérir une nouvelle œuvre d’Hippolyte Poterlet, venant ainsi illustrer le lien étroit entre les deux artistes.