Dans le cadre de l’exposition
Delacroix en héritage
Autour de la collection Etienne Moreau-Nélaton

(11 décembre 2013 – 17 mars 2014)

En lien avec l’exposition Delacroix en héritage qui célèbre la fidélité de grands collectionneurs à l’œuvre de Delacroix, le musée Eugène Delacroix programme un concert en hommage au grand compositeur Henri Dutilleux, disparu le 22 mai dernier, arrière-petit-fils du peintre paysagiste Constant Dutilleux, ami proche de Delacroix. Henri Dutilleux, un des plus grands compositeurs français du XXe siècle, était un donateur fidèle du musée. Ce programme inédit sera joué au sein de l’Atelier du peintre.

Concert dans l’atelier d’Eugène Delacroix
Hommage à Dutilleux

Jeudi 19 décembre 2013 à 20h
Jeudi 16 janvier 2013 à 20h
(ouverture des portes à 19h30)

PROGRAMME
Henri Dutilleux

Trois préludes - D’ombre et de silence, Sur un même accord, Le jeu des contraires
Sonate pour piano (dédicacée à Geneviève Joy) – Allegro con moto (en fa dièse mineur) - Lied (lent) - Finale : Choral - Variations I, II, III et IV
Pianiste : Jonas Vitaud

Tarifs : 24€ (plein) / 17€ (réduit, Amis du Louvre, Amis du musée Delacroix, moins de 26 ans) : 12€ (solidarité)
Réservation obligatoire au 01 44 41 86 50

Henri Dutilleux, compositeur

Né en 1916 à Angers, ayant grandi à Douai, il entre en 1933 au Conservatoire de Paris, avant de remporter le grand prix de Rome en 1938. Il s’y familiarise avec la tradition française, tout en s’intéressant de sa propre initiative à des modernes honnis de l’institution, comme Bartok. Il est ainsi impressionné par l’École de Vienne, en particulier Alban Berg, même s’il n’adopte pas l’écriture dodécaphonique.

Henri Dutilleux a été un des plus grands compositeurs français du XXe siècle. Son œuvre a été récompensée et célébrée, en France comme à l’étranger. En 1967, il reçoit le grand prix national de la musique en pour l’ensemble de son œuvre, en 1983 le grand prix international du disque de Montreux. En 1987, le prix international Maurice Ravel et celui du Conseil International de la Musique lui ont été décernés. Il reçoit en 1994 le Praemium Imperiale du Japon pour l’ensemble de son œuvre et en 1998, le Royal Philharmonic Society Awards pour The Shadows of Time. Pour cette pièce, il reçoit aussi en 1999 le prix de Cannes et la même année, le grand prix de la presse musicale internationale.
En 2005, lui est attribué le prix international Ernst von Siemens.

C’est avec sa Sonate pour piano, en 1948, qu’il trouve son langage. Composée pour sa femme, la pianiste Geneviève Joy, cette œuvre révèle ses points forts : la construction, le rythme, la couleur. Ces qualités le prédestinaient à composer pour l’orchestre, qui allait dès lors devenir son instrument privilégié, faisant de lui l’un des derniers grands symphonistes de l’histoire. Sa Symphonie n° 1, en 1951, n’est, malgré sa suprême qualité, qu’une étape avant son premier grand chef-d’œuvre, la Symphonie n° 2 Le Double, en 1959. Œuvre aux couleurs instrumentales inouïes, faisant dialoguer un petit et un grand orchestre avec un sens aigu des atmosphères oniriques, elle est créée par l’immense Charles Munch, défenseur passionné de la musique de Dutilleux. Celle-ci ne cessera dès lors d’être jouée par les plus grands. En 1965, George Szell et l’Orchestre de Cleveland créent Les Métaboles, l’une des plus géniales pièces d’orchestre du XXe siècle. En 1970, c’est Rostropovitch qui crée le Concerto pour violoncelle Tout un monde lointain qu’il lui avait commandé : il est aujourd’hui au répertoire de tous les violoncellistes, à égalité avec Dvorak et Schumann.

En 1977, il fait une infidélité à l’orchestre pour composer son unique quatuor : Ainsi la nuit. Chef-d’œuvre, là encore, d’une concentration d’écriture et d’une maîtrise de la sonorité. Un an après, retour au symphonique avec le magique Timbre Espace Mouvement ou La Nuit étoilée : sous-titre emprunté à un tableau de Van Gogh, rappelant à quel point l’inspiration de Dutilleux était non seulement spirituelle mais visuelle.
En 1985, c’est pour Isaac Stern qu’il compose le concerto pour violon L’Arbre des songes, encore une référence au rêve dans une musique qui est un appel constant à l’imagination. Après Mystères de l’instant (1989), la voix fait son apparition dans sa création. En 1997, c’est encore un grand chef, Seiji Ozawa, qui crée Shadows of Time, où trois voix d’enfants demandent « Pourquoi nous, pourquoi l’étoile ? », en référence au Journal d’Anne Frank : rare allusion à l’histoire dans une œuvre globalement intemporelle. Dans ses dernières années, alors qu’il travaille de plus en plus lentement, il ne sort de son silence que pour répondre à l’invitation d’interprètes féminines qui l’inspirent : c’est pour la violoniste Anne-Sophie Mutter qu’il compose Sur un seul accord, pour la soprano Dawn Upshaw qu’il écrit Correspondances en 2003, et pour Renée Fleming qu’il achève sa dernière œuvre, Le Temps L’Horloge, créée sous la direction d’Ozawa au Japon en 2007, et dans sa version définitive à Paris en 2009.

Henri Dutilleux fut fidèle à une tradition musicale française qu’il sut réinventer. Avec Messiaen et Boulez, il demeure comme l’un des rares compositeurs français qui marquèrent la deuxième moitié du XXe siècle.

Jonas Vitaud, pianiste

« Une grande délicatesse d’articulation et une sonorité infiniment travaillée… »
Après quatre premiers prix au Conservatoire National Supérieur de Paris, Jonas Vitaud est Lauréat de plusieurs concours internationaux et se produit dans de prestigieux festivals : Roque d’Anthéron, Piano aux Jacobins, Summer Festival de Dubrovnik, French May à Hong-Kong…
Jonas Vitaud a travaillé avec des maîtres de la création comme Henri Dutilleux ou György Kurtag et ces rencontres ont été une source décisive d’inspiration et d’épanouissement artistique. Son premier disque solo consacré à Brahms a été salué par la critique.
www.jonas-vitaud.fr/‎

Constant Dutilleux, peintre

Constant Dutilleux (Douai,1807-Paris,1865) fut surtout un peintre de paysages, proche de Corot et des artistes de Barbizon. Il fit connaissance de Delacroix en 1847 et entretint avec lui une correspondance régulière et très amicale. Preuve de cette amitié, Delacroix lui offre ses dernières peintures, un petit Lion et une esquisse de Tobie et l’Ange. Voici la lettre que lui écrit Delacroix trois mois avant sa mort pour accompagner ce don :

Ce vendredi matin [8 mai 1863]

Mon cher ami,
Quand j’ai vu avant-hier dans vos mains et sous vos yeux la petite esquisse de Tobie, elle m’a paru misérable quoique cependant je l’eusse faite avec plaisir. Enfin quoiqu’il en soit de cette impression, je me suis rappelé après votre départ que vous aviez regardé avec plaisir le petit lion qui était sur un chevalet. Je souhaite bien ne pas me tromper en pensant qu’il a pu vous plaire : je vous l’aurais envoyée tout de suite sans les petites touches nécessaires à son achèvement et que j’ai faites hier. Recevez- le avec le même plaisir que j’ai à vous l’envoyer et vous me rendrez bien heureux.
votre sincèrement dévoué
Eug. Delacroix
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